Ambiance Assuree !

Genres :
Thèmes :
Distribution :
Durée :

Louis Berthier est un assureur quadragénaire aussi fringant que distrait.
Pour remplacer sa secrétaire, en arrêt temporaire, il a eu l’idée de recruter Pétula, avec qui il a une liaison (Ah ! Le démon de midi !). Seulement voilà : Claire, l’épouse autoritaire de Louis, qui travaille avec lui dans la compagnie d’assurance, est de retour plus tôt que prévu. Louis va devoir jouer serré pour que Claire ne se doute de rien sur sa relation avec Pétula. La mission va s’avérer plus que périlleuse  : Pétula est en effet très olé olé, avec même une tendance plus que poussée à la nymphomanie. Louis a aussi oublié l’arrivée de Jean-Damien, un stagiaire très coincé, accompagné de sa mère, Anémone, du genre collet monté (en apparence…). Il devra aussi compter avec Jean (d’Amiens !) réparateur de photocopieuses et blagueur invétéré, avec Claude, la femme de ménage, célibataire sans-gêne et curieuse, sans oublier Eric, un livreur belliqueux et accessoirement ex-petit ami de… Pétula !
Face à ce petit mode haut en couleur, Louis parviendra-t-il à se tirer d’affaire ? Rien n’est assuré… sauf l’ambiance !

ACTE 1

 

SCENE 1

CLAUDE

 

Avant l’ouverture de rideau, on pourra passer la chanson « Femme, femme, femme » de Serge Lama.

A l’ouverture du rideau, on découvre Claude, un balai qu’elle serre dans ses bras et avec lequel elle entreprend des pas d’une danse langoureuse.

CLAUDE (chantant, sur l’air de Mon manège à moi) – Tu me fais tourner la tête, mon ménage à moi, c’est toi. Je suis toujours à la fête quand je te tiens dans mes bras. (Théâtrale à l’excès, tout en donnant un coup de balai et en envoyant la poussière sous l’armoire.) Poussière, tu n’es que poussière… (Au public.) Vous avez entendu ? Pas mal le ton, hein ?... (Epelant.) Ton, T O N, pas T H O N… Quand j’y pense, j’aurais dû faire du théâtre… (Réfléchissant.) Remarquez, pour me retrouver face à un public qui n’a aucun goût et qui n’y comprend rien ! Je ne parle pas de vous, hein… Quoique… (Elle sort un magazine télé de la poche de sa blouse et un crayon.) Alors… Voyons voir… En six lettres… Commençant par e. Survolté… J’hésite entre excité et énervé… Ceci dit, c’est pas tout à fait pareil… Tenez, mon beauf Maurice, eh ben quand il s’est marié avec ma sœur, elle l’excitait, maintenant, elle l’énerve… (S’adressant à un couple de spectateurs dans le public.) Je parie que c’est comme ça dans votre couple, hein ? Allez : faut pas me la faire à moi… Ce qui me gêne avec excité, c’est le x… Le x, je m’y vois pas… (Au public.) Vous non plus… (Contrariée mais sans plus.) Merci… (Reprenant son magazine.) Et là, en horizontal : nom des habitants de Chantilly… (Au public.) Vous n’en avez pas la moindre idée, je suppose ?... Je ne sais pas si ça vous fait ça, mais moi, plus je me creuse la cervelle, plus j’ai des trous de mémoire… Bon, on cause, là, et le ménage ne va pas se faire tout seul… Faut encore que je me tape le local à archives ; entre nous, j’aimerais autant me taper un mec, local ou d’une autre commune, je ne suis pas difficile. (A un homme du public.) Vous, par exemple, vous ne seriez pas libre après le spectacle ?... D’accord : je ne suis pas de la première fraîcheur mais faut être réaliste : vous non plus et je vous le redis : je ne suis pas difficile ! (Reprenant son balai et chantant à nouveau, sur l’air de La vie en rose.) Quand je le prends dans mes bras, je le passe comme ça, ce n’est plus l’heure de la pause… Je le passe dans le séjour, parfois même dans la cour, et ça fait quelque chose…

 

 

SCENE 2

CLAUDE, JEAN

 

On sonne avec insistance. Claude se dirige vers la porte d’entrée, en traînant les pieds. Elle a laissé son magazine sur la table basse.

CLAUDE – Et voilà ! On ne peut même pas travailler en paix ! Je vous jure, il y a des fois, on ferait mieux de ne rien faire ! Vous me direz, c’est ce que je faisais déjà hier, mais comme je n’avais pas fini…

Claude va ouvrir. Un homme est devant la porte d’entrée ; il a une mallette en main.

JEAN (enjoué) – Madame

CLAUDE (rectifiant) – Non, mademoiselle. (Soupirant, mais sans plus.) C’est pas que j’y tienne, mais c’est comme ça

JEAN (compatissant) – On ne fait pas toujours comme on veut

CLAUDE – Si vous êtes représentant en quoi que ce soit ou en autre chose, les patrons ne sont pas encore arrivés

Jean entre et serre vigoureusement la main de Claude.

JEAN – Grasset. Jean Grasset

CLAUDE – Tant mieux pour vous

JEAN (rigolant) – Parce que Jean Graisset, ce ne serait pas terrible. Jean Grosset non plus

CLAUDE – Vous en avez d’autres en stock ?

JEAN (spontané) – Oui : Jean Crasset

CLAUDE – Là, on doit avoir fait le tour

JEAN – A vérifier. (Réfléchissant.) Je n’ai pas de pelle mais il faudrait peut-être que je creuse davantage

CLAUDE – Et vous êtes là pour quoi au juste ?

JEAN – Société Millebureaux. (Déclamant.) Millebureaux, la copie sans défaut. Ca en jette, n’est-ce pas ? C’est le slogan de ma boîte. A ne pas confondre avec une boîte avec un seul gant… (Rigolant.) Slogan, seul gant

CLAUDE (un brin amusée) – Alors vous !

JEAN – Quand je suis lancé, c’est dur de m’arrêter

CLAUDE – Tout ça ne m’explique toujours pas ce que vous venez faire ici

JEAN – C’est vous qui nous avez appelés

CLAUDE – Moi ?

JEAN – Oui, enfin vos patrons ; c’est pareil

CLAUDE – Pas au niveau des salaires

JEAN – Je suis là pour la révision de la photocopieuse

CLAUDE – J’y suis

JEAN – L’important, c’est d’y rester !… A ce que j’ai compris, même si elle est encore jeune, on s’en sert beaucoup

CLAUDE (soupirant) – Tout le contraire de moi

JEAN – Celle-là, elle me plaît bien… Je vous parle de votre blague

CLAUDE (fataliste) – Il vaut mieux en rire

JEAN – Vous avez raison : de nos jours, les gens sont trop graves

CLAUDE – Comme les accents

JEAN – Bah dites donc : vous aussi vous aimez plaisanter à ce que je vois !... Au fait, vous le trouvez comment ?

CLAUDE – Quoi donc ?

JEAN – Mon accent. (Légèrement grivois.) Vous pensiez à autre chose je parie ?

CLAUDE – Non

JEAN (un brin déçu) – Ah ? L’accent, c’est parce que je suis Picard

CLAUDE – Ce sont des choses qui arrivent

JEAN – Quand je dis Picard, je ne vous parle pas de la marque, hein ?... Les congelés, très peu pour moi. Gelés ou pas d’ailleurs

CLAUDE – Un vrai festival !

JEAN – Pour être plus précis, je suis du département de la Somme, d’Amiens exactement

CLAUDE – Je compatis. En un mot, là aussi

JEAN – Ca fait seulement trois semaines que je suis à Paris pour le boulot

CLAUDE – Moi, ça fait trente ans

JEAN – Vous connaissez Amiens ?

CLAUDE – Non

JEAN – C’est presque au cœur de la Picardie. (Rigolant.) C’est mieux qu’une tachycardie au cœur ! (Donnant un coup de coude à Claude.) Pas mal celle-là non plus, hein ? On ne dirait pas mais ça cogite là-dedans !

CLAUDE – Ca a l’air

JEAN – Entre nous, Amiens, c’est vraiment une ville à découvrir

CLAUDE (sans grande conviction) – Oh ! Sûrement

JEAN – Pas attirante du premier abord mais qui gagne à être connue

CLAUDE – Tout comme moi

JEAN (sur sa lancée) – Avec une magnifique cathédrale à visiter, qu’on croie ou qu’on soit athée

CLAUDE – Sans doute, mais l’heure tourne et je crois qu’il faut se hâter

JEAN – Vous avez raison. Le travail avant tout, c’est ma devise

CLAUDE – La mienne serait plutôt tout avant le travail

JEAN – La bête est où ?... Je vous parle de la photocopieuse, hein

CLAUDE (désignant le local de la photocopieuse) – Là

JEAN – Dans notre jargon, on appelle cette pièce la salle de reproduction

CLAUDE (à l’homme du public qu’elle avait apostrophé) – Je vous y attends après le spectacle

JEAN – Bon. Je vais m’y atteler

CLAUDE – C’est ça : attelez-vous

JEAN – Il est possible que je fasse des allers-retours jusqu’à ma voiture ; ça va dépendre des travaux et s’il y a des pièces à changer

CLAUDE – Vous n’aurez pas besoin de sonner : la porte ne sera pas refermée à clé. Ce matin, avant votre arrivée, je l’avais fermée pour être tranquille. La porte, pas la bouche

JEAN – Je suis désolé d’avoir débarqué si tôt… J’avais même peur de ne trouver encore personne à cette heure-ci

CLAUDE – Perdu

JEAN – Navré si je vous ai dérangée en plein travail

CLAUDE – Le risque était minime

JEAN – Tant mieux. Allez Jean : au turbin !

Jean est entré dans le local de la photocopieuse. On sonne à nouveau.

CLAUDE – C’est pas vrai ! Il y a un complot ou quoi ? Une conspiration de casse-pieds ! Ah ! Il faut vraiment tout faire ici !  Et à force de tout faire, croyez-moi, on ne fait pas grand-chose !

 

 

SCENE 3

CLAUDE, PETULA

 

Claude finit par aller ouvrir, en traînant à nouveau les pieds. Une jeune femme se tient à l’entrée. Très maquillée, elle porte des talons très hauts et un tailleur très court. Elle a un sac à main en bandoulière.

PETULA (très expansive) – Bonjour !

CLAUDE (nettement plus distante) – Bonjour

PETULA – Je peux entrer ?

CLAUDE – C’est déjà fait il me semble

PETULA – Ah oui ! Je suis bête des fois

CLAUDE (ironique) – Si ce n’est pas tout le temps, c’est déjà ça

PETULA – C’est dingue : on fait des choses sans s’en rendre compte

CLAUDE – Ouais… Moi, même quand je ne fais rien, je ne m’en rends pas compte

PETULA – Je me présente

CLAUDE – Si ça vous fait plaisir

PETULA (spontanée) – Ah ça, le plaisir, c’est essentiel dans la vie, surtout pour une femme, pas vrai ?

CLAUDE (qu’on sent gênée) – Euh… Oui…

PETULA – Je suis Pétula

CLAUDE – Quézako ?

PETULA – Je sais : c’est très original. Moi, ça me plaît

CLAUDE – C’est déjà ça

PETULA – Et ça plaît aux hommes, c’est ça qui compte, non ?

CLAUDE – Ouais…

PETULA – Je remplace Germaine

CLAUDE (interloquée) – Germaine ?

PETULA – Oui, un machin comme ça

CLAUDE – Ca ne serait pas plutôt Georgette ?

PETULA – Voilà ! Georgette ! Un prénom de vieille quoi. (Directe.) Et le vôtre, c’est quoi ?

CLAUDE – Claude

PETULA – Ah ? (Cherchant à se rattraper.) C’est… particulier. Je pensais que c’était plutôt pour les hommes

CLAUDE – C’est androgyne

PETULA (qui n’a visiblement pas compris) – Je… Si vous le dites

CLAUDE – Si vous préférez, c’est comme Dominique ou Frédéric, ça fait deux sexes en même temps

PETULA (bas) – Je ne dis pas non

CLAUDE (sur sa lancée) – Quoique Frédéric, il y a q minuscule pour les filles

PETULA – Moi, j’en ai connu une de Frédérique, eh bien ce n’était pas le cas : un vrai camionneur la gonzesse… Remarquez, les camionneurs, j’aime bien, pas vous ?

CLAUDE – Hum…

PETULA – Et on ne vous a jamais prise pour un homme ?

CLAUDE – Rarement. Inversement, un homme m’a rarement prise

PETULA – Ca compense

CLAUDE – Ouais, on va dire ça… Dites, sans grand espoir, vous ne connaitriez pas le nom des habitants de Chantilly ?

PETULA – Oh là non ! Il y en a bien trop !

CLAUDE – C’est cela oui… (A elle-même.) Pour Chantilly, je n’en sais pas plus, mais là, on n’a pas la crème !

PETULA – Au fait, j’espère que ce n’est pas trop grave pour… Georgette… J’ai bon, là ?

CLAUDE – Oui, vous êtes bonne

PETULA – On me le dit souvent

CLAUDE – Elle s’est méchamment amoché l’épaule en patins à roulettes

PETULA – Les patins, j’adore !

CLAUDE – J’en suis convaincue

PETULA – Et vous, vous faites quoi ici ?

CLAUDE – Ca ne se voit pas ?... Pour l’instant, je vous écoute et c’est déjà pas mal. En théorie, le ménage, quand on ne m’empêche pas de le faire. En ce qui vous concerne, je suppose que c’est Monsieur Berthier qui vous a recrutée ?

PETULA – C’est Louis… Enfin, je veux dire c’est lui… Enfin, les deux quoi

CLAUDE – Moi, je ne l’appelle jamais par son prénom

PETULA – Il n’est pas encore arrivé ?

CLAUDE – Il ne devrait plus tarder

PETULA – Je me prendrais bien un café en l’attendant… J’ai besoin de me regonfler

CLAUDE (observant la poitrine de Pétula) – Pas de partout

PETULA – Faut vous dire qu’hier et avant-hier, j’étais en boîte

CLAUDE – Ca, c’est pas mon truc. Les guinguettes à la limite

PETULA – Vous devriez essayer : les boîtes, ça conserve

CLAUDE (avec un ton de complainte) – Les boîtes de conserve, je les digère mal

PETULA – J’espère quand même ne pas m’endormir face à l’ordinateur

CLAUDE – Ca ne risque pas de m’arriver : l’informatique, c’est pas mon truc non plus

PETULA – Et c’est quoi votre truc ?

CLAUDE – Je ne vous demande pas le vôtre

PETULA (toujours spontanée) – Vous pouvez

CLAUDE – J’ai ma petite idée…

PETULA – Vous savez, passer la journée devant un écran, ce n’est pas toujours une partie de plaisir

CLAUDE – Il vaut mieux devant que derrière

PETULA (allusive) – Ca dépend pour quoi…

CLAUDE – En plus, l’informatique, je m’en méfie… Mon beau-frère Maurice, il a commandé en ligne un livre « Comment arnaquer les gens sur Internet » eh bien il ne l’a jamais reçu

PETULA – Ah bah ça, ce n’est pas de chance…  Alors : un café, ça vous tente ?

CLAUDE – Non merci. Le matin, j’aime bien me faire mon thé

PETULA (bas et à nouveau allusive) – Moi aussi, mais pas forcément dans le sens où on l’entend… et pas que le matin…

 

SCENE 4

Les mêmes, LOUIS

La...

Il vous reste 90% de ce texte à découvrir.


Connectez vous pour lire la fin de ce texte gratuitement.



Donner votre avis !

Retour en haut
Retour haut de page