Biopic Love

L’histoire se situe dix ans après le début de la Covid-19. Face à une certaine révolte, le gouvernement a pris des mesures très restrictives. Certains citoyens refusant la vaccination ont perdu leur liberté. Un couple de comédiens parmi eux.

Entre passion et leur amour, c’est une entrée en abime où ils parcourent avec joie, humour, gravité les moments de leur vie amoureuse.

 

Acte 1 Amoureuse 1

Sonnerie de téléphone. lumière étrange, donnant un effet irréel.

VINCENT : Allo !

UNE VOIX : Salut, c’est Romain…

VINCENT : Ouais, qu’est-ce qui se passe ?

UNE VOIX : Je suis dans la merde, j’ai la covid.

VINCENT : Quoi ?

UNE VOIX : J’ai la covid !

VINCENT : T’en est sûr ?

UNE VOIX : Oui, j’ai passé un test. Je suis dans la merde, j’te dis… Je ne peux pas partir en Hongrie, pour ma pub, tu te rends compte ? Il faut un test pour l’avion. Ils vont m’empêcher de partir.

VINCENT : Tu sais, les tests ne sont pas fiables à 100%. Comment tu te sens ?

LA VOIX : Je me sens bien. Mais j’ai le moral à zéro. J’ai besoin de gagner cet argent, bordel !

VINCENT : Calme-toi. Essaie d’en passer un autre.

LA VOIX : Ouais, j’ai pris les devants. Ce soir, j'aurai les résultats d'un PCR.

VINCENT : Tu vois, rien n’est perdu. Bon tu nous tiens au courant ! Okay…

Il raccroche.

SISSIA : Qu’est-ce qu’il se passe ?

VINCENT : Romain a attrapé la covid.

SISSIA : Il est sûr ?

VINCENT : J’espère qu’il ne nous l’a pas refilé ! Il nous rappelle ce soir. Il aura les résultats d’un PCR.

SISSIA : On n'aurait peut-être pas dû rouvrir le théâtre si tôt, après le confinement.

VINCENT : Ouais peut-être, mais… on était tellement heureux de reprendre. Tellement content de sortir de tout ça… Écoute, on ne va pas se mettre martel en tête. Attendons. On verra bien.

SISSIA : Oui, espérons qu’on ne l’ai pas.

 

NOIR

La lumière s’ouvre sur un studio. Un personnage debout. une femme est allongée dans un lit.

NARRATEUR : Et si je vous disais que l’histoire de ces deux-là a commencé par un baiser. Vous me diriez sans doute : Banal ! Et vous auriez certainement raison. Mais, imaginez ce baiser à travers la fenêtre d’une voiture, sans étreinte, inconfortable, sans la possibilité de s’accrocher à l’autre, ce besoin que l’on éprouve parfois, de peur que ce soit un dérèglement de votre cerveau ; parce que vous n’avez plus embrassé la bouche d’une femme, depuis au moins quatre ans. Ça donne à réfléchir, n’est-ce pas ? Imaginez que ce baiser se passe à quatre heures du matin. Vous êtes là, la gueule enfarinée, parce que cela fait déjà deux heures que vous poirotez dans votre voiture et que celle que vous attendez est justement en train de négocier son départ auprès de l’homme qu’elle veut quitter, pour vous suivre.  Mais lui, l’autre, lui, il n’est pas du tout d’accord. Alors ça crie, ça hurle, ça braille son désaccord. Ça casse la vaisselle, ça jette les bibelots sur les murs. Enfin, vous voyez le tableau, quoi. Et pourtant, elle, soudaine, inattendue, est là ; accroché à la fenêtre de votre portière de voiture, comme un nouvel espoir, comme une deuxième jeunesse, comme une escapade aux Baléares, une gondole à Venise, on laisse au loin les pyramides, on est si bien... Elle est là, le sang brûlant dans ses veines, attisant le  désir. Avec son cœur qui bat la chamade, comme une amoureuse, comme cette amoureuse qu’elle n’a plus été depuis bien longtemps. Et la voilà qui se hisse sur la pointe des pieds pour vous donner ce baiser, à vous, comme une excuse, de ne pas pouvoir vous suivre…

La femme, allongée, bondit hors du lit.

ELLE : Bonjour les enfants.

LUI : Qu’est-ce que c’est que celle-là ! Madame, qu’est-ce que cela signifie ? D’où sortez-vous ? 

ELLE : Comment, d'où que je sors ? Eh bien ! Tu le sais bien !

LUI : Mais je ne vous connais pas !… mais en voilà une idée !… Qu’est-ce que vous faites dans mon lit ?

ELLE : Mais tu sais très bien ce que je fais dans ton lit. Non mais, t’en as une santé !… Dis donc l’inconnu (s’adressant au public) Il me demande pourquoi que je suis dans son lit !

LUI : Mais, absolument ! Quoi ? J’ai le droit de savoir… Qui êtes-vous ? Comment êtes-vous ici ?

ELLE : Non, mais on se croirait chez le juge d’instruction ! Qui que je suis ?… Eh ! Ben, la môme crevette, parbleu !

LUI : La danseuse du moulin rouge ?

ELLE : Tu l’as dit, bouffi ! Avec ça qu’il ne le savait pas, le bébé ! Puisqu’on s’est pochardé tous les deux ! Et qu’il m’a ramené à son domicile ! C’est beau chez toi dit donc ! hé, allez donc, c’est pas mon père.

LUI : Ha non, non, non, non Ma chérie ! Non !

ELLE : Quoi ?

LUI : Tu n’peux pas. Qu’est-ce que c’est que ça ?

ELLE : Ça ! Mais c’est mon thé.

LUI : Alors, tu joues la scène de la dame de chez Maxim’s avec une tasse de thé à la main, alors qu’elle est censée sortir de son lit ?

ELLE : Pardon ! de TON lit !

LUI : Hein ! Oui… enfin, oui, de MON lit.

ELLE : Qu’est-ce que ça peut faire, il n’y a pas de spectateur.

LUI : Oh oui, toi, rien ne t’arrête, comme si c'était la première fois. Ça n’ t’est jamais arrivé sur scène, n’est-ce pas ? Il y a des comédiens au théâtre pourtant qui s’en souviennent, encore, eux ! Ça t’est arrivé dans l’ile des esclaves. 

ELLE : Dans l’île des esclaves…

LUI : Hé oui. Parfaitement. Mais, tu fais mieux encore, tu entres sur scène avec quelque chose dans la bouche. Tu crois que personne va s’en apercevoir et tu finis par le mâcher et l’avaler en catimini. Dis que c’n’est pas vrai ! ?

ELLE : Oh ! Oh ! Oh ! moui.

LUI : Et puis, Vis-à-vis de moi, ça n’te dérange pas ?

ELLE : Ho là là qu’est-ce que t’es raide.

LUI : Raide ou pas raide, ça n’a aucun rapport. C’est toi qui m’as proposé que l’on répète des scènes ensemble, pour revoir nos textes. Tu pourrais faire un effort. Bon, d’accord, on s’occupe comme ont peu pour se distraire, depuis qu’on est confiné comme ça, tous les deux. Mais, quand même, faut un minimum de sérieux.

ELLE: Oui, eh bien, on peut s’amuser, aussi, non ? 

LUI : T’as raison, tu as toujours raison. D’accord… amusons-nous. Puisque tu y tiens. On reprend ?

ELLE : Hun Hun… 

LUI : Action !

ELLE : Lucien ! Lucien ! Suce-moi.

LUI : Mais !... tu changes de pièce ?

ELLE : Pourquoi, ça te gêne ?

LUI : Non, mais tu pourrais me prévenir.

ELLE : (en haussant le ton) Bon, on y va oui ou non ?

LUI : Vas-y…

ELLE : J’ai été piquée par une guêpe, j’ai été piquée par une guêpe. Lucien, Lucien suce-moi ! suce-moi !

LUI : Mais fiche-moi la paix.

ELLE : Mais tu as dit toi-même, que ça peut être mortel une piqûre de mouche où de guêpe, si l’on ne cautérise pas ou si on ne suce pas immédiatement la plaie. Il n’y a rien pour cautériser, alors suce-moi. (Elle montre son derrière.)

LUI : Mais tu m’embêtes, vas le faire toute seule.

ELLE : Est-ce que je peux ?

LUI : Bon et bien, vas le demander à qui tu veux, mais fiche-moi la paix.

ELLE : (regardant un homme dans la salle) Monsieur, s’il vous plaît.

LUI : Non, mais ça va pas ! Tu vas te donner à sucer comme ça à tout le monde ?

ELLE : Puisque tu n’veux pas, toi (en pleurnichant). Bon et bien, puisque tu ne veux pas sucer, je vais demander à Victor…

LUI: hein ! Le domestique ?

ELLE : (en s’en allant) Victor ! Victor !

Elle s’éloigne et revient.

Fin de la scène

ELLE : C’était bien, hein ? On a bien joué.

LUI : Je t’assure, c’est pas toujours facile de te suivre. 

ELLE : (elle prend une petite voix, comme celle de son personnage). 

Tu n'aimes pas jouer avec moi ?

LUI : Mais si, j’aime jouer avec toi (rires, il la prend dans ses bras et l’embrasse). J'adore jouer avec toi ! C’est un bonheur de jouer avec toi ! Mais arrête de changer le texte.

ELLE : Le texte…Ho !.. J’ai faim, je mangerai un bœuf…

LUI : Ha ! c'est l’heure du biberon. Ton estomac réclame.

ELLE : Parfaitement ! 

LUI : Réglé comme une montre suisse. Tu ne pourrais pas sauter un repas de temps en temps !

ELLE : Ça ne va pas, non ! Il faut que je mange moi ! 

LUI : Oui, oh, je disais ça ! Je connais ton coup de fourchette.

ELLE : Tu n'as pas faim ?

LUI : Non…

ELLE : C’est vrai, toi, tu n’as jamais faim. Un vrai serpent.

LUI : C’est toujours agréable.

ELLE : Ne te fâche pas mon biquet. Je disais ça pour rigoler.

LUI : Tu sais… on ne joue plus là, t’es pas obligée de continuer à prendre cette petite voix… 

ELLE : Qu’est-ce que tu es rabat-joie. (Reprenant sa voix normale) Bon, je vais prendre mon petit déj. Tu veux un café ?

LUI : Un petit déj à midi.

ELLE : Tu sais très bien que je suis réglée comme ça.

LUI : Ho, oui, je sais. Et qu’est-ce que tu manges ? 

ELLE : (elle s’éloigne) Maquereaux aux vins blancs, pourquoi ?

LUI : Non rien. J’adore l’odeur des maquereaux, quand je bois mon café.

ELLE : Rabat-joie !

LUI : puff

Noir

Sonnerie de téléphone. lumière étrange, donnant un effet irréel.

VINCENT : Ah salut Romain, alors ce test ?

UNE VOIX : Négatif, je peux partir. 

VINCENT : Tu vois, fallait pas s’inquiéter.

UNE VOIX : Sur le moment, j'ai flippé !

VINCENT : Nous aussi, on est soulagé. Attends, Sissia veut te parler.

SISSIA : Romain, salut, alors tu n’as rien !

LA VOIX : Plus de peur que de mal. 

SISSIA : Tu sais, nous aussi, on est soulagé. On part dans quelques jours à Avignon comme on fait chaque année. Alors, on a un peu crisé. Finalement pour toi, même si tu travailles, ça va être des vacances.

LA VOIX : Ouais. Le réalisateur m’a à la bonne, et ensuite, je compte bien en profiter.

SISSIA : On croise les doigts pour toi. Fais-nous quelque chose de super. Allez on t’embrasse. Salut.

Elle raccroche. Une expression sur le visage de Vincent la surprend. 

SISSIA : Qu’est-ce que tu as ?

VINCENT : Rien, j’ai un peu mal à la gorge.

SISSIA : Comme ça, d’un coup ! Tu n'es pas malade au moins?

VINCENT : Non, c’est ce matin. Je pensais que ça passerait.

SISSIA : En tout cas, si demain tu as encore mal, je prends rendez-vous avec Holstein.

VINCENT : Okay mon amour.

Noir

Lumière, elle tourne en rond, elle peste. Lui, hors champs.

ELLE: Putain de confinement. J’en ai marre… j’en ai marre, j’en ai marre. Tu écris ?

LUI : Oui…

ELLE: Ça avance, alors ?

LUI : Oui… oui

ELLE : Tu es content ?

LUI : Ouiiiii…

ELLE : Moi, j’en ai marre de la compta et des dossiers.

LUI : C’est pour avoir des sous ma chérie.

ELLE : Je sais, mais j’en ai marre !

LUI : Qu’est-ce que t'as ?

ELLE : Tu passes toute la journée à écrire dans ton placard, je ne t’en veux pas, mais, moi, de la compta, j’en ai marre. Fais une pause s’il te plaît. Tu veux bien prendre un café avec moi ?

LUI : Ha ! il y avait longtemps. La cérémonie du thé. Un ou deux sachets ? Avec une citerne d’eau chaude ?

ELLE : Arrête ! hein !

LUI : Ça va durer alors ! 

ELLE : Tu exagères ! 

LUI : Attends, attends, je vais te servir. Que désire mademoiselle ? Un thé, bien sûr ! Avec la tasse, l’eau chaude à côté ? Ah ! et le sachet à part, bien évidemment. Un petit macaron ferait plaisir à mademoiselle ? Oui, alors c’est parti.

ELLE : Tu peux aussi me tenir simplement compagnie. Tu n’es pas obligé de faire l’intelligent.

LUI : D’accord. Tiens, tu me fais penser à mon pote chanteur de rue, Le Bihan. Comme lui, tu as besoin de ta brouette. Eh bien, ta brouette est là. Je t’écoute, tu veux aller où, à Tombouctou, en Ukraine ?... Bien qu’en ce moment…

ELLE : Tu crois qu’ils vont nous...

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